De notre rapport aux animaux

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    Léon Bloy disait : « Les animaux sont entre nos mains le gage du paradis perdu » et je partage ce point de vue. Dans la genèse de l’humanité, l’homme vivait en symbiose avec l’animal. Puis, pendant des millénaires, notre rapport aux bêtes s’est inscrit dans une logique de survie. Les peuples traditionnels chassaient pour se nourrir, toujours avec beaucoup de gratitude, remerciant l’animal de donner sa vie pour que d’autres puissent vivre.

    Mais encore une fois, la modernité a marqué un tournant dans l’histoire.  L’Homme démiurge s’est érigé prince de la création et a subordonné l’animal à son avidité et à sa cruauté. Les Peaux Rouges ne purent que regarder avec sidération leurs petits frères blancs tirer sur les bisons par la fenêtre des trains, laissant les bêtes agoniser au sol sans aucune considération…

    Il semble que le monde animal soit l’objet de bien des malentendus. Nous justifions les mauvais comportements de l’homme en disant : « c’est la loi de la jungle ! », mais nous oublions que quand un lion mange une antilope, il répond à son besoin vital et n’amasse pas outre-mesure. Et s’il y a, dans le monde animal, des concurrences et des antagonismes entre les espèces, il n’y a pas, à ma connaissance, d’espèce capable de s’auto-détruire comme l’humanité sait si bien le faire. Nous avons placé sur le dos de l’animal la charge de la prédation, de la férocité et de la barbarie, mais nous nous sommes bien trompés. Les centaines d’exemples d’entraide, d’empathie, de sensibilité, d’intuition et d’intelligence que nous découvrons toujours plus chez la gente animale viennent nous faire tomber de notre piédestal et modérer notre faconde.

    Faut-il le rappeler ? Nous sommes nous-mêmes des mammifères avec un cerveau très performant qui est aussi la source de tous nos tourments. Nous en arrivons à une férocité liée aux idées et à des antagonismes religieux, politiques ou philosophiques. Et d’où nous vient cette imagination qui nous amène à créer des usines à protéines animales, véritables camps de concentration produisant une viande pétrie de souffrance ? Et quid de nos lugubres expériences en laboratoire ôtant chaque année la vie à plus de 2,5 millions d’animaux, rien que dans notre pays ? Ces faits, auxquels s’ajoutent le massacre, déguisé en courage, des taureaux lors des corridas ou encore celui des merveilleuses baleines pour l’industrie cosmétique me dégoûtent profondément.  La condition infligée aux animaux pour le simple plaisir, le luxe ou la cupidité devrait être interdite et sévèrement sanctionnée.

    Avec ma femme Michèle, nous avons eu pendant des années un troupeau de chèvres dont chacune avait un prénom et une histoire. Nous avions une relation très sensible avec elles et sentions immédiatement quand l’une d’elles n’allait pas bien. De même, quand notre vache « Mama » est arrivée à la ferme, j’ai compris pourquoi cet animal était vénéré dans un nombre important de traditions. De sa masse, de sa présence, de son regard, de sa rumination transparaissait presque une dimension spirituelle. Elle donnait au temps une saveur d’éternité…

    C’est évident : nous devons repenser notre rapport à l’animal pour qu’il ne s’inscrive plus ni dans la violence ni dans cette adulation excessive souvent portée à nos animaux de compagnie. Prendre en compte ces compagnons de notre destin, en conciliant nos besoins vitaux avec le respect et la gratitude que nous leur devons, serait révélateur d’un grand sursaut de conscience pour notre humanité, appelée sans attendre à placer ses aptitudes au service de la Vie, dans le respect de tout ce qui vit.

     

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