Ecologie et liberté de la presse : un même combat ?

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    Savez-vous que le 3 mai est la Journée mondiale de la liberté de la presse ?

    Je vous vois sourciller et lis dans votre regard ; « en France la presse est libre ».

    Peut-être ? mais peut être pas si simple !

    En premier lieu pourquoi est-il important que la presse soit libre ?

    La presse joue un rôle fondamental dans la vie démocratique. Sans la liberté de la presse, la démocratie ne peut pas fonctionner. Les citoyens doivent être bien informés pour prendre les bonnes décisions, notamment lors des élections, pour avoir une idée précise de ce qu’implique leur vote. Or comme l’a décrypté François Gemene expert dans les politiques d’adaptation au changement climatique ; 3 électeurs sur 4 ont voté pour un programme incompatible avec les objectifs de l’ Accord de Paris lors du premier tour des élections présidentielles. Or comme l’avait démontré différents organismes dont Kaizen, sur les 12 candidats, seuls deux programmes étaient compatibles avec l’Accords de Paris et permettaient de rester potentiellement sous une hausse de 2 degrés à l’horizon 2050. Le vote des Français est d’autant plus surprenant que le Giec a rappelé 7 jours avant le 1e tour que nous n’avons que 3 ans pour agir pour respecter cet Accord de Paris.

    Il serait trop facile de pointer les médias comme responsables de l’absence de prise de conscience écologique pour ces élections.

    Comme souvent, les raisons sont multifactorielles et d’aucuns argueront que chacun choisit ses priorités mais il est évident que les médias ont leur part dans le fait que 3 français sur 4 n’aient pas voté en fonction de cette grille écologique. Les chiffres parlent d’eux mêmes. Pendant la campagne le temps consacré à l’écologie dans les médias n’a représenté que 3 % des échanges. Lors du débat entre deux tours, ce ne fut que 18 minutes sur les 3 heures et pas un mot sur le transport alors que c’est le premier secteur des émissions de GES. Mais ce n’est pas nouveau le collectif Plus de climat dans les médias a regardé tous les journaux télé depuis 2013 et le temps consacré au climat est inférieur à 1%. Or une étude américaine a démontré que les chaines d’infos influent sur l’avis des téléspectateurs. Comment dès lors comprendre les enjeux du dérèglement climatique qui sont à la fois complexes et demandent beaucoup de pédagogie. Peut-être est-ce lié au sujet qui n’est pas spectaculaire. On le voit, les journaux s’y intéressent seulement quand il y a inondations, tempêtes etc. La gestion de la crise du Covid par les médias pendant deux ans est un exemple éclairant. Depuis l’apparition de la pandémie, les journalistes sont attentifs aux recommandations des scientifiques, car il y a des morts, des images dans les hôpitaux à montrer. En revanche ils mettent de côté les études des scientifiques du climat, car il n’y a pas d’images sensationnelles à diffuser. Le choc des images avant l’envie de pédagogie. La tyrannie de la peur, contre l’intelligence de l’avenir.

    Mais alors est-ce moins une question de liberté que de choix éditorial ?

    Pas sûr ! Pour commencer, je vais rappeler qu’au classement de la liberté de la presse réalisé chaque année par reporter sans frontière, la France se situe à la 26 e position sur 180 pays. Ce qui n’est pas très glorieux. Je rappelle surtout qu’en France 90 % des médias appartiennent à 9 groupes aux intérêts économiques stratégiques. On y retrouve l’armement, la téléphonie, le BTP et le luxe notamment. Et ces groupes n’ont aucun intérêt à inciter à la sobriété condition sine qua non pour freiner le dérèglement climatique. Ils couperaient la branche sur laquelle ils sont assis. Et corolaires, ces médias sont tributaires des recettes publicitaires. Or ce sont la grande distribution et l’automobile qui représentent la part la plus importante des recettes de publicités. Dès lors comment faire par exemple une enquête sur l’impact des SUV quand vous en faites régulièrement la pub. Certes ils existent encore des journalistes qui écrivent des papiers sur l’écologie. Bolloré ou Arnaud ne prennent pas leur téléphone pour donner leur directive, c’est plus subtil. Mais tel un iceberg il y a deux parties. Le premier invisible pour le lecteur. Notre confrère Hervé Kempf rédacteur en chef du site en ligne Reporterre quand il travaillait au journal Le Monde était en charge des pages planètes et suivait le dossier Notre Dame des Landes. A partir du jour où Messieurs Niel, Pigasse et Berge ont racheté le journal, il n’a plus eu le droit de suivre le dossier Notre dame des landes ! L’autre visible mais tout aussi pervers. Quand la Convention citoyenne pour le climat a rendu ses conclusions, aussitôt les membres ont-ils été qualifiés par certains journalistes de ces groupes de presse de « Khmers verts » . La graine du doute était semée. La question écologique demande un vraiment changement de politique, de paradigme. C’est inconcevable pour ces propriétaires de médias.

    Je me suis concentré sur l’aspect écologique des conflits d’intérêts entre les propriétaires de presse et les médias qu’ils détiennent, ce n’est malheureusement pas le seul sujet qui pose question.

    Pour trier le grain de l’ivraie, comme avant d’acheter un vêtement ou un pot de pate à tartiner, prenez le temps de lire l’étiquette qui vous informera à qui appartient le média. Et cultivons précieusement cette liberté de la presse.

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