La langue des signes pour mieux communiquer avec les bébés

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    La communication gestuelle associée à la parole est un outil d’éducation bienveillante adapté aux bébés entendants. Grâce à ce langage simple et ludique, ils peuvent exprimer leurs besoins dès l’âge de 8 mois.

    Leur enfant sur les genoux, des parents entonnent la comptine du Petit escargot, les yeux rivés vers Sophie d’Olce. Telle une cheffe d’orchestre, la jeune femme les guide pour qu’ils soulignent chaque mot-clé d’un geste emprunté à la Langue des signes française : maison, pluie, tête, etc. Directrice artistique de la Compagnie Maya, Sophie d’Olce organise régulièrement des ateliers Signes avec bébé. C’est ainsi qu’un samedi après-midi, cinq parents et trois mamans, accompagnés de leurs enfants dont l’âge varie de 4 à 20 mois, s’initient à la communication gestuelle associée à la parole, dans une optique d’éducation bienveillante. « L’idée, leur explique-t-elle, est de vous permettre d’établir une communication privilégiée avec votre enfant. Je vais vous présenter vingt signes correspondant aux besoins primaires des petits de 4 mois à 3 ans : repas, sommeil et change. Notez que c’est un langage théâtral. Il n’y a pas que les mains : les expressions du visage et du corps sont également importantes. » Un à un, les parents découvrent, grâce à des chansons, des cartes sur lesquelles sont imprimées des images et des jeux de rôle, la façon de signer « téter », « pain », « eau », « encore », « j’ai mal », « pipi », « changer la couche » ou bien « je t’aime ».

    Atelier de langue de signes pour parents entendants et jeunes enfants.

    Communiquer plus tôt

    Comme le précise Sophie d’Olce, « avant l’âge de 18 mois, le larynx n’est pas formé pour permettre au bébé d’articuler des mots. En revanche, vers cet âge, les enfants commencent à faire des gestes pour s’exprimer, comme “coucou” ou “bravo”. Et plus tôt ils signent, mieux ils assimilent la langue des signes. » Certaines femmes enceintes participent d’ailleurs à ses ateliers. À l’écouter, les avantages de cet apprentissage sont nombreux : « Du côté des enfants, cette gestuelle naturelle leur permet de communiquer plus tôt et ainsi de réduire leurs frustrations, leurs pleurs et leurs colères. Parfois, des papas et des mamans me demandent comment signer “c’est interdit” ou “s’il-te-plaît”. Je leur réponds que ce qui m’intéresse, c’est de partir des besoins de l’enfant. Cet outil pédagogique s’inscrit dans une démarche de communication bienveillante. »

    La compagnie Maya présente un spectacle en langue des signes dans une crèche.

    Mieux comprendre les enfants

    Et du côté des parents ? Sophie d’Olce partage son vécu en tant que mère de deux enfants, le premier de 4 ans, le second de 6 mois. « Grâce à ce langage simple et ludique, constate-t-elle, nous pouvons mieux comprendre les envies et les émotions de nos enfants. Il nous est arrivé à tous de rester démunis face à notre bébé qui pleure alors qu’on lui a changé la couche, donné à manger et qu’il se réveille de sa sieste. C’est également l’occasion d’être pleinement dans le “ici et maintenant” : quand on signe, on se pose, on prête attention à son enfant, on le regarde. Impossible de le faire tout en étant sur son téléphone portable. Enfin, cela permet de stimuler son système d’apprentissage et de l’accompagner dans l’émergence de la parole. » « C’est un tremplin vers le langage parlé, rassure Sophie d’Olce. Je fais le parallèle avec la marche : avant de se tenir debout, le bébé avance à quatre pattes. Dans son souhait de faire comme les grands, l’enfant, qui intègre très tôt le mimétisme, n’aura plus recours aux gestes. Pour cette raison, je conseille aux parents de toujours accompagner le signe à l’énonciation du mot. » Autre recommandation qu’elle livre à la fin de son atelier, d’une durée d’une heure : « veillez à pratiquer les signes avec bébé de façon graduelle. Commencez par deux à trois signes seulement, même si vous avez envie d’en maîtriser plein. Ce n’est pas le nombre de signes qui compte, mais la qualité de la communication. Avez-vous des questions ? » Plusieurs mains se lèvent pour demander comment traduire « crèche », « câlin », « tétine » ou encore « merci » !

    L’apprentissage d’une vingtaine de signes

    Chaque famille repart avec une affiche présentant, sous forme de tableau imagé, vingt mots issus de la Langue des signes française. Plusieurs parents fredonnent la comptine du Petit escargot ! Si la plupart n’avaient aucune notion de la langue des signes, certains avaient commencé l’apprentissage avec le support de livres dédiés. Comme Florence, maman de la « doyenne » (!) des enfants : « Ma fille Charline, qui a 20 mois, m’observe beaucoup et reproduit ce que je fais. Elle a commencé, à l’âge de 1 an, à assimiler quelques signes comme “gâteau”. Le premier qu’elle a fait a été “changer la couche”. Cela simplifie tout : je ne me prends plus la tête à décrypter ses besoins. Je me suis inscrite à cet atelier car j’avais peur de mal signer. Même si je me dis que l’important, c’est d’avoir notre code à nous, autant lui apprendre la bonne gestuelle de la Langue des signes française. »

    Après avoir participé à un atelier découverte Signes avec bébé, Cécile a choisi de s’inscrire pour toute une année scolaire : « Quand ma fille Camille a eu 8 mois, j’ai cherché des activités que je pourrais partager avec elle et j’ai découvert la communication gestuelle associée à la parole. D’octobre 2016 à juin 2017, tous les quinze jours, nous sommes allées, ensemble, aux ateliers de la Compagnie Maya. Je l’asseyais en face de moi et je lui chantais des comptines. Le fait d’associer aux mots les gestes très poétiques de la langue des signes était réjouissant. » Vers 24 mois, Camille a commencé à arrêter d’elle-même de signer les ving-cinq mots environ qu’elle maîtrisait pour s’exprimer verbalement. Mère de deux autres enfants, Cécile raconte avoir eu le bonheur de voir sa fille aînée, alors âgée de 14 ans, échanger quelques signes avec sa petite sœur. Et, enseignante en petite section de maternelle, elle compte bien, de retour de son congé parental, utiliser au cas par cas ce précieux outil pédagogique avec ses élèves.

    Les enfants du silence

    C’est en tant que comédienne que Sophie d’Olce s’est, elle, formée à la Langue des signes française. Elle a suivi une formation intensive à l’International Visual Theatre, dirigé par Emmanuelle Laborit, première comédienne née sourde à avoir été récompensée du Molière de la révélation théâtrale pour son rôle dans la pièce Les Enfants du silence. Situé à Paris, cet espace d’échange, de rencontre et de découverte pour les personnes sourdes et aussi entendantes regroupe un théâtre, un centre de formation et une maison d’édition. À la naissance de son premier enfant, il y a quatre ans, Sophie d’Olce s’est rendue compte que, malgré sa maîtrise de la Langue des signes française, elle ne connaissait pas les mots de la petite enfance qui lui permettraient d’échanger avec son fils. Elle s’est alors inscrite à une formation de communication gestuelle associée à la parole, dispensée par l’association parisienne Signes2mains. En parallèle, elle a suivi une autre formation dédiée à la parentalité bienveillante. Et a fondé, en 2010, la Compagnie Maya. Basée à Paris, cette association culturelle et artistique propose des spectacles et des ateliers destinés aux enfants, dont Signes avec bébé. Pour permettre aux tout petits de sortir, eux aussi, du silence.

    Par Aude Raux – Photos : Jérômine Derigny (collectif Argos)


    En savoir plus :

    www.compagniemaya.com

    3 Commentaires

    1. L’article est intéressant mais il y a une erreur importante dans le titre notamment : on parle de LANGUE des signes et non de LANGAGE des signes. La LSF est une langue à part entière 🙂
      Par contre c’est vrai que pratiquer la LSF avec les bébés est un bon moyen de communiquer avec eux. Cela a été démontré à plusieurs reprises 🙂

    2. Bonjour, votre article est très intéressant mais le titre faux, on ne dit pas « langage » mais langue des signes! C’est une langue officielle, avec son vocabulaire, sa conjugaison, sa grammaire et sa complexité, il faut la respecter! Merci

      • Chers lecteurs,
        Merci pour votre remarque pertinent ! Nous changeons donc le mot langage par langue.
        L’équipe Kaizen.

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