La 17e édition du festival de La Gacilly s’est ouverte début juillet, où de nombreux photographes y exposent leurs images jusqu’au 31 octobre. Chaque année, le festival choisit de mettre en avant les travaux de photographes sensibilisés à la cause environnementale. Une opportunité pour fédérer une réelle « réflexion » et « conscience écologique autour des œuvres », soutient Stéphanie Retière, directrice du festival. Rencontres avec trois de ces artistes exposés : Greg Lecoeur, Sébastien Leban et Emmanuel Berthier.
Greg Lecoeur : « Mettre l’image au service de l’environnement »
Élu photographe de l’année en 2016 par le magazine National Geographic, Greg Lecoeur est un artiste sublimant les océans et la biodiversité à travers ses clichés sous-marins. Originaire du Sud de la France, où il y a grandi les pieds dans l’eau, c’est son amour pour la plongée et la nature qui lui ont finalement donné envie de se rediriger sur la voie de la photographie animalière. Pouvoir « mettre l’image au service de l’environnement » est important pour Greg Lecoeur qui, au fil de son évolution professionnelle, se considère « de plus en plus engagé » sur ces thématiques. Lors d’une précédente excursion en Antarctique, il déclare avoir constaté de près les effets désastreux du réchauffement climatique. Avec la photographie, l’un de ses objectifs est d’observer ces changements pour « transmettre un message et faire avancer les choses. »
Son exposition Voyage au centre de la mer, est dissimulée au milieu des arbres du petit parc de la Gacilly. Elle dévoile avec poésie la beauté des profondeurs marines et de ses habitants, tout en retraçant les clichés marquants de la jeune carrière du photographe. Avec le sourire, il déclare : « c’est une réelle consécration d’être ici. J’ai commencé il y a seulement dix ans. » Le spectateur est invité à déambuler à travers les images du photographe et à contempler cette biodiversité marine figée, si fragile et menacée par l’activité humaine. Partager optimisme et beauté à travers son appareil reste toutefois très important pour Greg Lecoeur. « Je veux être témoin de choses encourageantes et belles. Ma quête, c’est de magnifier le monde marin. »
Je m’abonne pour 1 an et 6 numéros à partir de 28€
Sébastien Leban : « Sensibiliser le spectateur à l’écologie et mettre en lumière ces différentes problématiques grâce à la photographie »
Lauréat du concours Fisheye x Gacilly 2020 sur le thème Climat et Photographie l’engagement d’une époque, Sébastien Leban se dit « engagé » et « sensible aux thématiques environnementales » dans son activité de photojournaliste. Profondément humaniste, « traiter de sujets sociétaux par le biais de son travail » a toujours été important pour ce dernier, qui a déjà réalisé des clichés très engagés tel que la problématique énergétique à Gaza. Depuis deux ans maintenant, il travaille sur un nouveau projet visant à documenter et dénoncer les conséquences du réchauffement climatique sur différents pays et peuples du monde. Il s’est notamment déplacé aux Pays-Bas, Maldives et Sénégal, ainsi que sur l’Île de Tangier, sujet principal de son exposition au festival de La Gacilly.
Située à 160 km de Washington DC, aux Etats-Unis, l’île fait partie d’une zone isolée et très marécageuse. Le photographe Sébastien Leban s’est immergé au contact des habitants pour documenter les conséquences directes du réchauffement climatique sur leur vie. L’Île pourrait être amenée à disparaître d’ici les trente prochaines années, si le gouvernement ne prend pas les mesures nécessaires face à l’urgence écologique. Cette inaction, Sébastien Leban la dénonce à travers ses clichés engagés. Ils dépeignent une certaine fragilité, où religion et politique se mêlent au déni climatique ambiant. Sébastien Leban ajoute : « Sensibiliser le spectateur à l’écologie et mettre en lumière ces différentes problématiques grâce à la photographie est important pour moi. » Les images sont à découvrir au Garage, une ancienne friche reconvertie en lieu d’exposition à l’occasion du festival de La Gacilly.
Emmanuel Berthier : « Je ne souhaite pas dénoncer. Simplement faire découvrir la nature et sa vulnérabilité de façon esthétique »
« Être dehors au contact de l’environnement, c’est passionnant », confie Emmanuel Berthier, sourire aux lèvres. En entrant dans la vie active, le jeune homme s’est naturellement tourné vers un BTS gestion de la nature. À force d’être sur le terrain, il décide un jour de s’essayer à la photographie pour témoigner de la fragilité de ces paysages sauvages et majestueux : « J’ai été le spectateur de moments rares que j’ai voulu immortaliser avec mes clichés. » Un simple passe-temps, qui occupe aujourd’hui l’intégralité de son activité professionnelle. Lorsqu’on le questionne sur son engagement écologique, le photographe répond : « Je ne prétends pas protéger la nature avec mes photos », avant d’ajouter « mon travail est toujours lié à l’environnement mais je ne souhaite pas dénoncer. Simplement faire découvrir la nature et sa vulnérabilité de façon esthétique. »
La série photographique les Sanctuaires du Morbihan est une commande spécialement réalisée pour le Festival de La Gacilly, dans le cadre de l’année de la biodiversité. À cette occasion, le photographe s’est immergé dans cinq réserves à-travers le Morbihan. En passant par les landes de Monteneuf, les marais de Séné, l’île de Groix, les étangs du Loc’h à Guidel, mais également autour du lac de Guerlédan. « En échangeant avec les personnes qui s’en occupe, on se rend compte de la difficulté de maintenir ces grands espaces », explique le photographe. Ces réserves naturelles ont été développées afin de protéger les écosystèmes de l’activité humaine. Au fil des saisons, Emmanuel Berthier a su capturer avec poésie la vie et les paysages sauvages de ces immenses réserves biologiques du Morbihan.
Pour aller plus loin : site du Festival photo de La Gacilly
Un engagement de longue date
Être « acteur de la transition écologique et sociale » est l’une des missions principales que s’est donné le festival de La Gacilly, depuis sa création en 2004. « Nos messages engagés, on les applique dans l’organisation du festival. Nous avons une démarche d’amélioration continue sur nos impacts environnementaux », rappelle Stéphanie Retière, directrice de l’événement. Ces choix passent notamment par les supports utilisés lors des expositions, aujourd’hui entièrement fait de PVC recyclé. Le festival souhaite également « développer le dialogue avec d’autres partenaires sur les enjeux écologiques » pour travailler conjointement sur les bonnes pratiques à adopter. Depuis 2011, La Gacilly fait par exemple partie du Collectif des Festivals Engagés en Bretagne. Un projet lancé en 2005, visant à accompagner les organisateurs dans leur processus de développement durable et environnemental.